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En Christ

par T. Austin-Sparks

Chapitre 4 - Ascension et Gloire

On met beaucoup l'accent, à juste titre, sur la mort de Jésus et sur sa résurrection. On parle peu de son ascension. Elle représente pourtant, elle aussi, une vérité spirituelle, et on a grand tort d'en méconnaître l'importance. Tout autant que la mort et la résurrection, elle est à la base de notre vie en Christ, et essentielle à l'accomplissement du dessein éternel de Dieu. Dans la révélation scripturaire de la vie spirituelle en Christ, qui vint progressivement par l’onction de l’Esprit-Saint, nous voyons les choses clairement exposées. Il y a deux vérités auxquelles il est fait fréquemment allusion. La première, est que Dieu nous a fait asseoir dans les lieux célestes en Christ, la seconde, est que nous sommes sur la terre des étrangers, des pèlerins. Ces deux affirmations sont utiles pour une bonne interprétation de la Parole de Dieu. Notre vocation en Christ a son origine dans les cieux, son développement est dans les cieux, son aboutissement est dans les cieux, le modèle auquel nous devons être conformes est dans les cieux. La raison d'être de notre appel, toute notre vie et tout notre service, toutes les ressources dont nous pouvons avoir besoin, tout est vrai dans les cieux.

À cet égard, deux mots représentent les deux moitiés d'une seule et même vérité : ce sont les mots ascension et translation. Ces deux termes sont complémentaires. L'ascension rend possible la translation. La translation ne peut pas avoir lieu, si l'ascension n'a pas eu sa place. L'ascension est un acte, un acte unique, un acte précis. La translation au contraire est un mouvement progressif, et l'enlèvement n'est autre que la dernière étape, l’étape triomphale, de ce mouvement « translationnel ».

Quand le Seigneur Jésus monta au ciel et fut reçu dans la gloire, son ascension avait un caractère représentatif et relatif, exactement au même litre que sa mort et sa résurrection. C'est comme représentant de ces nombreux fils que Dieu voulait conduire à la gloire (Hébreux 2 :10) qu'il transfère de la terre au ciel, par son ascension, la source de toute vie spirituelle, la réserve de toutes les forces vitales de notre être intérieur. En fait, tout ce qui touche à notre salut, notre sanctification, notre service, notre gloire chrétienne se trouve maintenant dans les cieux, et n'existe plus nulle part sur la terre.

À partir de la « naissance d'en-haut », tout, dans une vie chrétienne véritable, vient d'en-haut, depuis les motivations les plus secrètes de notre activité jusqu'à ses développements les plus lointains ; toutes les initiatives, tous les objectifs à atteindre, tous les détails d'exécution, tout doit venir d'en-haut.

Le cri du cœur de tous les citoyens des cieux reste pour toujours celui-ci : « Toutes mes sources sont en toi ! » (Psaume 87 :7). Leur vocation est une vocation céleste, leur vie tout entière, leur vision, leur marche, leur espérance, aussi bien que leur origine, leur demeure, leur royaume ; tout est céleste pour eux.

Quand les enfants de Dieu en sont à cette étape de la vie spirituelle où l’on n'a pas encore réalisé ce que c'est que l'ascension avec Christ, ils font constamment l'expérience que rien sur cette terre — même si c'est Dieu qui l'a donné — ne correspond à leur vision et ne réussit vraiment à les satisfaire.

Abraham ? Un pays et une cité lui sont promis. Il obéit. Il part. Il marche avec Dieu. Mais il est bien clair qu'au fur et à mesure que sa foi se développe, aucune réalisation terrestre de la promesse divine ne parvient à satisfaire son espérance, et à passer à ses yeux pour un accomplissement. Quand il arrive dans le pays de Canaan, il n'a pas du tout l'attitude d'un homme qui jouit d'une promesse enfin réalisée. Il a été béni de Dieu, c'est vrai ; du point de vue humain, sa situation s'est améliorée. Mais au fond, il est loin, bien loin d'être satisfait. Pourquoi ?

Simplement parce qu'avec l'élargissement et l'approfondissement de sa vie spirituelle, sa foi réclame constamment quelque chose de plus que ce que la terre peut donner.

Il s'était fait une certaine idée de la promesse divine, et il se réjouissait d'en voir la réalisation. Mais sa communion croissante avec Dieu lui fait considérer peu à peu ses perspectives premières comme insuffisantes, et représentant d'une façon bien imparfaite ce dont son cœur à vraiment soif. Aussi le voyons-nous rejeter ou refuser, les uns après les autres, les privilèges qui n'apportent avec eux qu'une gloire terrestre. Le « pays de la promesse », pour finir, cesse d'être pour lui une chose de cette terre. Les auteurs sacrés, éclairés par ce même Esprit qui avait conduit Abraham, nous disent que c'est une patrie céleste qu'il désirait (Hébreux 11 :4-16) et une cité dont Dieu est l'architecte et le bâtisseur (verset 10). Si nous mettons ces passages en parallèle avec d'autres comme Matthieu 3 :9 ; Jean 8 :56 ; Galates 3 :7, 4 :26 ; Hébreux 12 :22, nous sommes bien obligés de conclure que la vision d'Abraham s'est portée toujours davantage vers un autre monde, à mesure que sa foi s'éclairait.

Conjointement avec ce recul constant de son horizon, et comme pour l'obliger à porter ses yeux plus loin, Abraham voit les choses de la terre sombrer dans la mort, pour revivre après d'une vie nouvelle, d'une vie de résurrection. Elles ne seront plus pour lui des choses de la terre, désormais, elles seront du ciel, car c'est par un acte de Dieu qu'il les a retrouvées. Il en fut ainsi non seulement de ses biens matériels, mais de ses relations, de ses perspectives d'avenir, de sa vision, de la promesse de Dieu, de sa foi, de son service, de ses capacités.

C'est ici un principe important qui nous est révélé. Il est à la base de tout ce que Dieu fait et de tout ce que l'homme peut être appelé à faire de vraiment fructueux et durable. Ce principe, c'est que notre collaboration avec Dieu, notre participation aux choses de Dieu, doit être d'initiative divine, et non pas le produit naturel d'un simple changement de direction dans notre vie.

Les expressions telles que « entrer dans le ministère » — « se préparer au service de Dieu », renferment une idée tout à fait fausse et représentent une notion extrêmement dangereuse de l'œuvre de Dieu. À moins que de tels candidats ne sachent ce que c'est que de voir leurs propres œuvres — même bien intentionnées — prendre le chemin de la mort, et eux avec elles, leur intrusion dans le royaume de Dieu aura pour effet, de trois choses l’une : ou bien ils seront brisés ; ou bien ils se trouveront tôt ou tard dans une impasse, dans une situation absolument sans issue ; ou bien ils iront de l'avant avec un semblant d’être vivant et d’avoir une apparence de succès, mais sans rien accomplir qui soit réellement de Dieu, leur ministère restant quelque chose de terrestre, quoique religieux, sincère, et plein de bonnes intentions.

Nous avons, dans le cas de Moïse, une illustration frappante de ce principe de droit divin.

Il n'y a aucun doute que Moïse n'ait eu, en Égypte, une véritable révélation. Dans ce ramassis de Sémites opprimés, avilis, excédés par le régime qu'on leur inflige, une intuition céleste lui fait reconnaître les élus de Dieu (Hébreux 11 :25). Il discerne même quelque chose de plus : ce qu’est la croix.

L'opprobre de Christ, qui va être entre les mains de Dieu l'instrument de leur rédemption (verset 26). Enfin, il se rend compte qu'en ce qui le concerne personnellement, le péché consisterait à préférer tous les avantages terrestres dont il jouit à la cour, pour tourner le dos à la croix et à tout ce qu'elle représente. Il pèse le pour et le contre, et prend sa décision : Il répudie son adoption royale, il choisit l'opprobre, il quitte le palais.

Or, après avoir adopté une telle attitude, il semblerait qu'il pût s'attendre à voir le sceau de Dieu sur ses efforts. Eh bien, non. Il lui reste encore à apprendre la grande leçon de sa vie. C'est que, pour qu'une vision céleste devienne une réalité, il faut que ce soit Dieu qui prenne l'initiative de son accomplissement. À Lui, et à Lui seul, le choix des méthodes et la préparation des instruments.

Pour donner corps à sa révélation, pour mettre ses plans à exécution, Moïse fait une première tentative, en se plaçant sur le terrain d'une certaine supériorité personnelle, qui lui semble mettre les atouts de son coté. Mais le résultat montre bien que le résultat est contraire à ce qu’il avait envisagé. Tout est compromis ; il ne récolte que la confusion et l’ajournement de ses desseins. Il prend peur et s'enfuit.

Il faut qu'il sorte ainsi de la lice, qu'il se fasse à la dure discipline de l'inaction, et qu'il en vienne, pour finir, à son fameux « Je ne peux pas » ! Alors, — mais alors seulement, — il retrouve, sur une injonction formelle de Dieu, sa mission de libérateur.

Que s’est-il passé ? Ceci simplement, il fallait que Moïse mourût à sa propre conception des choses, disparût de son propre programme, et rentrât en scène par une voie céleste, par une initiative divine. Mais désormais, Moïse aura partie liée avec le trône de Dieu. Il en a toujours été ainsi.

Un programme divin exige, pour son accomplissement, un instrument revêtu d'une autorité divine. Dieu a toujours estimé nécessaire d'accréditer Lui-même ceux qu'Il chargeait d'un mandat particulier. Tant qu'il ne s'agit que de « l'image des choses célestes » (Hébreux 8 :5), une montagne pourra suffire pour conférer à l'envoyé de Dieu l'ascendant spirituel dont il a besoin. Mais quand il s'agit des choses célestes elles-mêmes, comme c'est le cas dans la nouvelle alliance, il faut plus que cela, il faut une union personnelle avec le Seigneur glorifié.

On peut observer le même principe dans la vie de David, d'Ésaïe, d'Ézéchiel, de Paul et d'autres. « L'Esprit m'enleva entre la terre et le ciel », raconte Ézéchiel. Procédé étrange mais qui représente une loi spirituelle que Dieu respecte toujours. Car, quand l'Esprit nous ramène là où Il a besoin de nous, c'est toujours avec un mandat d'origine céleste et d'autorité divine.

Il ne s'agit pas ici des divagations d'une âme qui se laisserait enfler par un idéalisme extatique ou par des produits de sa propre imagination. Réelles ou imaginaires, des « visions » de ce genre peuvent fort bien nous être présentées par le diable. Parce que des perspectives engageantes semblent s'ouvrir devant nous, cela ne veut pas dire nécessairement qu'elles soient de Dieu. Le Maitre s'est toujours détourné résolument des promesses de succès et des perspectives de gloire que l'ennemi faisait miroiter devant Lui. Il savait bien que la croix était le seul chemin capable de le conduire à son but.

Nous retrouvons ce même principe dans la vie de l'apôtre Paul. Il s'appelle « un sage architecte », par quoi il veut simplement dire qu'il lui a été donné de voir les plans du divin Architecte, et que maintenant, il travaille d'après ces plans. Il dut être « enlevé jusqu'au troisième ciel » pour contempler ces choses ineffables.

Mais on ne peut pas « >être dans l'esprit » sans savoir quelque chose de cela. Car la vie selon l'Esprit comporte toujours un élément de « ravissement ». Le Seigneur Jésus a fait de fréquentes allusions à cette possibilité d'être au ciel quoique sur la terre. N'a-t-Il pas dit : « Le Fils unique qui est dans le sein du Père. » — « Il (le Fils) ne fait que ce qu'il voit faire au Père » ? Par le Saint-Esprit, son esprit était uni à Dieu, et cette union céleste se reflétait dans toute son activité.

C'est peut-être très bien de faire appel à la Bible comme à un manuel d'enseignement, de vie pratique, un ensemble de vérités, une mine inépuisable de textes où tout est divinement ordonné, mais c'est une toute autre chose de voir les principes spirituels, les éternels principes spirituels qui sont cachés derrière les textes, derrière la morale, derrière tout cet ensemble de vérités. De l’un à l'autre, il y a toute la distance qui sépare deux genres de vie absolument différents. L'un se conforme à la vérité telle qu'il la voit transmise par l'organe d'une intelligence humaine, une vérité, infinie, pour se mettre à la portée des hommes, s'est pliée au moule imparfait des mots et des phrases ; et il y a des gens qui ne voient que cela, et qui vivent de cette transmission de la vérité. Mais c'est autre chose que Dieu veut pour nous, Il veut que notre esprit, renouvelé et vivifié par le Saint-Esprit, saisisse et s'assimile, par-delà des limitations de la langue humaine, la signification infinie de la révélation. La transmission représente le coté humain; mais la révélation spirituelle dépasse infiniment cette transmission en langage humain ; ce qu'il faut pour assimiler la révélation spirituelle, c'est un entendement céleste, ce que le Nouveau Testament appelle « >la pensée de l'esprit » par opposition à « la pensée de la chair » (Romains 8 :6).

S'il n'y a pas d'union vivante et personnelle entre nous et le Seigneur glorifié, nous ne pouvons ni connaitre sa pensée, ni le servir comme Il veut être servi.

Que cette union vivante avec Christ dans la gloire soit nécessaire, et possible, c'est ce que la Bible tout entière souligne maintes et maintes fois, surtout dans le Nouveau Testament; et une étude attentive des textes ne laisse subsister aucun doute sur la vraie nature de cette union.

Quand Christ remonta au ciel, Il y fut reçu en triomphateur ; désormais l'autorité Lui appartient en propre. C'est comme Fils de l'homme qu'Il a arraché au prince de ce monde le sceptre du pouvoir, et c'est pour l’homme qu'Il l'a fait. Ce retour triomphal dans la gloire, le psalmiste semble l'avoir contemplé de loin, quand il chante au Psaume 24 :

« Portes, élevez vos têtes! Et élevez-vous, portails éternels, et le roi de gloire entrera.
Qui est-il ce roi de gloire? L'Éternel des armées, lui, est le roi de gloire
. »

S'il est vrai qu’à ce moment-là Christ a paru devant le trône-même de Dieu avec notre propre humanité, rachetée, purifiée, sanctifiée et s'il est vrai que son Corps — l'Église — manifeste l'union organique qui nous unit à Lui, il s'ensuit qu'en esprit nous avons maintenant notre place à ses cotés dans la gloire, pour partager avec Lui sa souveraineté, pour dominer avec Lui, même sur les puissances des ténèbres.

En d'autres termes, nous pouvons dire plus sobrement que sa souveraineté s'exerce par l'organe de son Corps et des membres de son Corps.

Dans cet ordre d'idées, il y a d'autres portes qui sont mentionnées à coté des portes éternelles. Il y a « les portes du séjour des morts ». Aux temps bibliques les portes étaient le lieu où se rendait la justice et où se prenaient les décisions officielles. Les portes du séjour des morts représentent donc les conseils de l'enfer, ses complots ténébreux, ses jugements, qui sont tous — d'après le contexte — dirigés contre l’Église. La promesse de Jésus (Matthieu 16 :18), s'explique comme suit : à cause du lien céleste qui nous unit à celui qui a franchi triomphalement les portes éternelles, ces autres « portes » ne prévaudront pas. Car Sa souveraineté a son siège dans l’Église ; l’Église est le lieu de sa souveraineté.

Quand Il parle de cette Église qu'Il veut bâtir et de sa supériorité sur les puissances des ténèbres, Il ne fait pas allusion simplement à un petit groupe de croyants juifs, pas plus qu'au noyau initial de je ne sais quelle puissante organisation terrestre, il adresse cette parole à ceux qui vont être le commencement de son Église. C'est à son Église à Lui qu'Il promet l’ascendant spirituel. C'est aux représentants de son Église qu'Il déclarera également : « Voici je vous ai donné le pouvoir de marcher... sur toute la puissance de l’ennemi. », Luc 10 :19.

Tout cela doit être compris et interprété à la lumière de la croix, qui est à l'arrière-plan de toutes les paroles de Jésus et de toutes ses actions. Le Saint-Esprit ne peut venir sur nous et en nous que dans la mesure où nous avons été incorporés à Christ, non seulement dans Sa mort, mais dans sa mise au tombeau, dans sa résurrection et dans son ascension dans la gloire céleste. Pour recevoir une double portion de l’esprit de son maitre, il faut qu'Élisée passe le Jourdain avec lui, — « le baptême en sa mort » — et se trouve avec lui encore quand le ciel s'ouvre pour le recevoir.

Il en est toujours ainsi. C'est en faveur du Corps et par l’organe du Corps, que le Saint-Esprit manifeste la souveraineté de la Tête, du Chef. Et lui ne peut « s'attacher à la tête » s'il ne connait par expérience cette union céleste avec Lui.

L'Église n'est pas une société terrestre, une institution ou une organisation d'ici-bas, elle est un corps céleste. Les systèmes ecclésiastiques de ce monde, qu'on les appelle « l’Église » ou « les églises », n'en sont trop souvent qu'une grotesque caricature. Dieu ne sait pas ce que c'est que les sectes ou les « églises », au sens où l’on entend ce mot en général. Dans la pensée et les préoccupations de Dieu, il n'y a jamais eu qu'une Église. C'est cette « assemblée des premiers-nés » dont parle l’épître aux Hébreux et dont nous venons de décrire quelques-uns des traits essentiels. Toute la confusion dont nous sommes les témoins dans ce domaine, est due à cet eternel vouloir de l’homme de constituer sur la terre, et de river à la terre quelque chose qui soit de Dieu. Dieu ne se mêle pas de cette affaire-là, Il laisse tranquillement les entreprises humaines s'épuiser dans leurs efforts, ou se perpétuer dans leurs illusions. Pendant ce temps, tranquillement, sans que « ni marteau, ni hache » ne soient entendus, Il superpose les pierres et édifie en un temple spirituel, en un édifice céleste, ceux qu'Il a élus dès la fondation du monde. Ceux-là seulement qui auront l’avantage d'une vision céleste, pourront voir la chose se détourner de ce qui a cessé de répondre à leurs besoins, et trouver leur joie et leur bénédiction à faire eux-mêmes, comme Jésus, ce qu'ils voient faire au Père.

Quelques mots maintenant sur la seconde moitié de cette grande vérité : la translation.

Nous avons dit au début que la translation est un mouvement ascensionnel progressif qui atteint son point culminant et son triomphe dans un acte précis. Cet acte, naturellement, c'est l’apparition de notre Seigneur Jésus-Christ. Le cycle complet de l’expérience chrétienne, tel que Dieu cherche à le réaliser en nous, comporte une transition — ou une translation — progressive, du terrestre au céleste. Le principe de la translation, c'est la foi. Et la foi exige, de par sa nature-même une base spirituelle, quelque chose qui soit absolument en dehors du domaine des sens ; elle ne peut pas reposer sur un fondement terrestre ; un fondement céleste lui est absolument indispensable. Or, précisément, les voies de Dieu avec ses enfants ont toujours eu pour but de leur faire perdre leurs points d'appuis terrestres, pour les rendre absolument dépendants de Lui-même, et de Lui seul.

La foi nous conduit toujours dans des situations précaires et embarrassées. Elle réclame toujours de nous l’abandon de ce qui est visible et temporel. Dans un certain sens, on peut dire que la foi est une perpétuelle menace ; elle nous expose toujours à être décontenancés. On peut même dire que c'est une menace qui est mise à exécution. Car la foi confond toujours notre jugement naturel, notre sagesse, notre savoir-faire, nos prévisions, nos certitudes, notre sécurité. La foi ne manque jamais de nous couper tous les ponts qui peuvent nous relier encore a quelque chose de solide ; et, au point de vue des ressources humaines, elle tarit, l’une après l’autre, toutes les fontaines ou nous avions l’habitude de venir puiser.

II faut qu'il en soit ainsi, car c'est le seul moyen qui permette à Dieu de nous révéler les ressources célestes dans leur merveilleuse plénitude. Dieu fait en sorte de rendre une révélation indispensable, et Il prend ses mesures pour que les grandes réalités célestes deviennent peu à peu, absolument essentielles à notre existence.

Un beau jour, nous le rencontrons sur notre chemin, et nous expérimentons comme une mise en demeure, discrète mais certaine, qui va décider de la suite de notre vie : encore une fois, il va falloir choisir ; c'est un pas dans l’obéissance de la foi qu'Il nous demande, et, quand nous l’avons fait, ce pas, nous découvrons, non seulement que nous avons avancé, mais que nous sommes montés, et que nous occupons maintenant un point de vue spirituel beaucoup plus avantageux, d'où nous voyons des choses qui nous étaient tout à fait inconnues auparavant.

Ainsi, par une succession d'actes de foi qui déterminent chaque fois pour nous un mouvement ascensionnel, Dieu forge en nous cette foi des élus qui nous prépare à l’enlèvement, dernière étape de la translation.

C'est une foi corporative, une foi devenue générale dans le Corps de Christ, qui provoquera, pour finir, la venue du Seigneur ; ainsi se trouvera confirmée, du même coup, la nature céleste de ce Corps dont nous sommes membres.

Il ne faut pas considérer la seconde venue de Christ simplement comme un événement futur qui a sa place marquée d'avance dans l’horaire des prophéties. La seconde venue, c'est, dans le Corps de Christ, la foi parvenue au point terminus de son développement. Cette foi a creusé un abime entre le Corps de Christ, d'une part, et d'autre part, le monde, les choses d'ici-bas, — même lorsqu'elles affectent un extérieur religieux. L'enlèvement est le point culminant, l’aboutissement normal.

Le dessein éternel de Dieu est gouverné par des principes spirituels, éternels, invisibles ; ces principes, il faut les comprendre. Or, c'est précisément l’obéissance de la foi qui nous en donne la clé, et plus l’obéissance de la foi se développe, plus se développent aussi notre intelligence spirituelle et notre capacité de collaborer avec Dieu pour la réalisation de son grand dessein. Dans le chapitre 11 de la lettre aux Hébreux — cette admirable description de la foi, de sa nature et du chemin qu'elle nous trace — on peut partout voir ce principe entre les lignes. Or, « il y a une seule foi », — celle-là, précisément. Paul l’appelle « la foi du Fils de Dieu » (Galates 2 :20).

Cette foi-là, elle est une puissance intérieure, une vraie force de combat, spirituellement parlant. Dans les grandes batailles qui se sont livrées au nom de Dieu, c'est elle qui a toujours été l’élément de premier plan. Aussi bien, dans le conflit suprême qui nous mettra aux prises avec la hiérarchie satanique, ce sera, là encore, cette foi du Christ triomphant qui fera pencher, en notre faveur, la balance de la victoire (Apocalypse 12 :11). Ainsi sera dûment établie, par l’organe de l’Église, cette souveraineté du ciel sur « les portes du séjour des morts [le Hadès] », — les complots de l’enfer ; la terre tout entière sentira le contrecoup de ce triomphe de la foi.

Malheureusement, la foi nécessaire à ce mouvement ascensionnel, à cette « translation », est rare ; il y en a peu qui soient prêts à en payer le prix. Le Seigneur était bien fondé à demander s'Il la trouverait sur la terre à sa venue.

Insistons-y. Il doit y avoir un transfert progressif et général, de la terre au ciel, de tous nos intérêts. Nous sommes appelés à avoir de plus en plus, vis-à-vis de toutes choses, ce sentiment d'être des étrangers là où nous sommes, des pèlerins, des voyageurs, sans feu ni lieu. Du même coup, si nous répondons à cet appel, nous sentirons l’attraction croissante de ce qui est spirituel et céleste, et nous réaliserons qu'après tout, c'est bien là le cours normal d'une vraie vie en Dieu. Quand nous passerons définitivement de l’autre coté, ou quand aura lieu l’acte culminant et final de notre translation, nous constaterons que la nouvelle situation qui nous est faite ne représente rien de bien nouveau pour notre homme intérieur ; au contraire, il se sentira tout à fait à sa place. L'enlèvement n'est que la dernière étape du voyage spirituel, la gloire qui nous inonde soudain. Un simple pas. Comme Énoch « nous ne serons plus, parce que Dieu nous aura pris ».

Il ne reste plus qu'une chose à signaler. C'est que ce chemin-là est le chemin de la gloire. Il l’est dans deux sens différents : déjà glorieux en lui-même, et conduisant, en outre, à une gloire encore supérieure.

Ce n'est jamais que d'une gloire céleste qu'il peut s'agir. Elle sera manifestée, pour finir, dans une humanité devenue parfaite. Pour le moment, elle n'est là qu'en secret, dans l’être intime du croyant dans son esprit. Chaque fois que l’obéissance de la foi nous fait monter d'un degré, il se passe en nous quelque chose qui ne peut pas être décrit, qui est comme un avant-goût de la gloire céleste.

Incorruption, incorruptibilité, compréhension parfaite, capacités parfaites, grâce, harmonie et beauté parfaites — il y a de tout cela dans la gloire divine. Mais ce serait donner d'elle une bien pauvre idée que de la limiter à ces éléments-là. Imperceptiblement, ou presque imperceptiblement, le mouvement ascensionnel de la foi et l’action de la grâce nous conduisent là.

La semence incorruptible, qui est la promesse d'un corps incorruptible, se trouve déjà en nous par la foi.

Quant à la compréhension, les yeux de notre entendement s'ouvrent toujours plus grand, et les choses célestes deviennent pour nous plus réelles et plus familières que les choses visibles.

Dans les crises les plus douloureuses, il y a une paix de Dieu qui surpasse toute intelligence, et qui n'a d'autre cause que l’harmonie de notre volonté avec la volonté de Dieu. Dans la Bible, ce mot paix pourrait, dans presque tous les cas, être avantageusement remplacé par le mot harmonie.

De même, la capacité spirituelle, cet autre élément de la gloire céleste, c'est ce qui, en nous, passe outre aux limitations du temps et de l’espace, et tient en respect toutes les forces de l’univers.

Quant à tout ce qu'il y a de beauté dans la compassion, dans la délicatesse, dans l’humilité, dans l’amour divins, il est superflu de démontrer que la gloire de Dieu, c'est cela.

Toutes ces choses cependant n'épuisent pas les éléments qui constituent sa gloire. La perfection dans le caractère, dans les capacités, dans le service, engendre une autre perfection : la perfection dans la satisfaction.

Ce ne sont pourtant là que les fondements de sa gloire... Que sera le reste !

Ici, nous ne pouvons que nous taire. Car cette gloire ne peut être connue qu'en esprit. Les mots ne sauraient la décrire. Souvenons-nous seulement qu'il est écrit de nous que nous sommes « appelés à sa gloire éternelle », que nous obtenons le salut « avec la gloire éternelle », et que nos légères afflictions produisent pour nous « un poids éternel de gloire ».

Ainsi, comme nous avons été « crucifiés avec Lui », « ensevelis avec Lui », « rendus à la vie avec Lui », nous sommes de même, enlevés et glorifiés avec Lui.

Par toutes sortes d'initiatives dont nous sommes les objets de sa part, Il cherche à rendre expérimentale, pour nous, cette union avec Lui dans son ascension.

Que Dieu nous donne de répondre Amen ! Á ces mouvements de sa grâce, quoi qu'il en coûte, même s'ils représentent, pour notre vie terrestre, un déracinement.

Ce n'est pas seulement pour Nathanaël et ses condisciples (Jean 1 :51), c'est aussi pour nous que Dieu veut un ciel ouvert, qui laisse constamment apparaître à nos yeux le Fils de l’Homme dans la gloire. Car c'est pour nous qu'il est là-haut. Tandis que nous sommes encore sur la terre, Il est dans les cieux notre représentant, les prémices de cette humanité qui est encore la nôtre, mais qui est à la veille d'être glorifiée avec Lui.

Ainsi tout, dans notre ministère terrestre, doit venir du ciel, comme aussi tout doit y retourner.

Si nous réfléchissons devant Dieu à toutes ces choses, nous trouverons une actualité toute nouvelle, un sens tout nouveau dans ces exhortations de la Parole de Dieu, qui nous sont si familières :

« Si donc vous avez été ressuscités avec le Christ, cherchez, les choses qui sont en haut, où le Christ est... », Colossiens 3 :1

« Ne vous amassez pas des trésors sur la terre... mais amassez-vous des trésors dans le ciel. », Matthieu 6 :19-20

«Pensez aux choses qui sont en haut, non pas à celles qui sont sur la terre. », Colossiens 3 :2

Si nous voulons paraître avec Christ dans la gloire, il faut que, déjà maintenant, notre vie soit cachée avec Christ en Dieu, et que nous-mêmes nous soyons morts aux choses de la terre (Colossiens 3 :2-3).

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